• La ceinture verte de Niamey : cri de cœur pour un joyau qui se meurt

    En parcourant la voie menant à l'Aéroport International Diori Hamani de Niamey, il est agréable de contempler la rangée d'arbres qui s'étend à perte de vue. C'est une partie de la ceinture verte. Cette ceinture couvrait une superficie de 2 500 ha de plantation. Elle constitue le plus grand massif forestier artificiel périurbain du Niger avec une végétation constituée principalement d'Azadirachta indica (Neem), Prosopis juliflora, Acacia nilotica, Eucalyptus camaldulensis.

    Elle s'étend sur une bande discontinue en quelques endroits. Elle quitte à l'Est de l'hippodrome, contourne la ville vers le Nord-Est, puis se dirige vers l'Ouest jusqu'au fleuve à la hauteur de Goudel. Elle traverse quatre (4) communes de Niamey (I, II, III et IV), avec des formes et des superficies variables. En 2005, la ceinture verte a été réduite à une superficie d'environ 2140,28 ha selon les travaux de cartographie réalisés par l'unité de cartographie des Services de l'Environnement (DSCF/DE).

    La création de la ceinture verte était une idée des autorités Nigériennes qui, après l'indépendance de la République en 1960, avaient constaté une dégradation progressive du couvert végétal aux alentours de la ville de Niamey et décidèrent  de protéger l'environnement périurbain de la capitale contre les intempéries par la création  d'une bande verte large de un (1) km et de 25 km de longueur.  Cette bande, selon leurs estimations, partirait de l'hippodrome à l'Est pour rejoindre le fleuve Niger à la hauteur  de Goudel.

    Et c'est ainsi qu'est née l'idée d'une ceinture verte dont les premières plantations ont démarré en 1965 sur les fonds propres de l'Etat et se sont poursuivies jusqu'en 1995 avec l'appui des partenaires techniques et financiers.  L'actuelle ceinture verte de Niamey, est donc le fruit de plus de 40 ans d'efforts d'investissement de l'Etat et de ses partenaires techniques et financiers en l'occurrence l'Agence  Américaine pour le Développement International (USAID) ; le Programme des Nations Unies pour le Développement à travers le Bureau des Nations Unies pour la zone soudano-sahélienne (PNUD/UNSO) ; la Banque Mondiale à travers l'Agence Internationale pour le Développement (IDA). Les travaux, dont le montant global des investissements s'élève à plus de trois (3) milliards de F CFA, ont été exécutés d'abord en régie, puis sous forme de projets en plusieurs phases.

    Un constat au goût amer

    Mais force est de constater que depuis quelques années, ce joyau qui faisait la fierté de la municipalité et des résidents, fait l'objet de fortes pressions dues à une urbanisation sans cesse croissante et insuffisamment maîtrisée. Dans ce contexte,    l'existence même de la ceinture verte de Niamey est mise à rude épreuve du fait notamment des coupes frauduleuses d'arbres, du déversement massif de déchets liquides et solides (14 dépotoirs), de la prolifération de fabriques de savon traditionnel, de l'occupation illégale de l'espace par des squatters engendrant des incendies et une insécurité grandissante, des lotissements et des morcellements anarchiques opérés par les communes et les particuliers.

    Ce qui entraîne bien naturellement des problèmes fonciers. En effet, les propriétaires coutumiers revendiquent quotidiennement leurs terres dans l'emprise de la ceinture verte de Niamey, alors qu'ils jouissent de l'usufruit de ces terres. Et pour cause, ces populations exploitent ces terres à des fins de cultures pluviales. Face à une telle situation et pour accompagner les efforts de réhabilitation entrepris, le Ministère de l'Environnement et de la Lutte Contre la Désertification avec l'appui du PNUD, a organisé un forum national sur la gestion durable de la ceinture verte de Niamey qui a eu lieu du 15 au 17 décembre 2008 au Grand Hôtel et au Stade Général Seyni Kountché. Suite à ce forum un comité interministériel a été créé par arrêté n°0070/MI/SP/ D/MUH/MELCD du 30 juillet 2009.

    Ce comité est chargé du suivi de la mise en œuvre des recommandations du Forum National sur la Gestion Durable de la Ceinture Verte de Niamey.  Dans ce cadre, il  a été proposé au Gouvernement une suspension de toutes les activités en cours dans l'emprise de la ceinture verte avec des campagnes d'information et de sensibilisation du public ; des missions de patrouilles des agents forestiers ; un travail de collecte des données et de documents sur la ceinture verte. Plusieurs inventaires ont aussi été réalisés au sein de l'espace. Un inventaire des lotissements a été réalisé dans l'emprise de la CVN et un autre de toutes les occupations se trouvant dans l'emprise de la ceinture à travers des enquêtes sur le terrain ont été réalisés.

    Des réunions d'informations et des données ont été recueillis auprès des communes, des chefs de quartiers, des ayants droits coutumiers pour constituer une base de données sur un éventuel dédommagement.  Ainsi, les travaux du comité ont permis de recenser 14 lotissements couvrant environ 510ha 06a correspondant à plus de 300 îlots soient plusieurs milliers de parcelles. Mis à part les lotissements, d'autres attributions de parcelles ont été faites dans l'emprise de la ceinture verte de Niamey (l'hippodrome, l'écurie, le parc d'agrément, ...) dont l'ensemble couvre une superficie d'environ 93,65 ha. Sur la base des investigations et au stade actuel, la superficie lotie au sein de la ceinture verte est estimée à environ 603ha 71a, soit 28% de la superficie totale.

    Sur cette base on estime la superficie actuelle de la ceinture verte à environ 1598 ha. A l'issue de toutes les investigations, le comité a décidé de proposer au gouvernement le déclassement de 10 des 14 lotissements (plus de 400 ha) et de retirer les 4 lotissements (moins de 50ha). Selon le comité, ces déclassements seront effectués sous réserve que les communes fassent des compensations en bornant le reste de la ceinture verte se trouvant dans leurs entités administratives ou par des plantations dans les autres blocs. En plus  de ces conditions, le comité a demandé au niveau de la zone tampon, sa limitation à une bande de 30 m de part et d'autre de l'emprise du goudron.

    Des solutions en perspective

    Il s'agit notamment de la suspension de toutes les opérations de mise en valeur dans l'emprise de la ceinture verte à titre de mesures conservatoires ; de la délimitation de la ceinture verte, son bornage et son classement. Le comité parle aussi de l'enlèvement des déchets solides de la ceinture verte de Niamey ; de la réhabilitation des parties dégradées et la création d'infrastructures adaptées pour la valorisation de la ceinture verte. Il a été noté les compensations à prévoir pour les propriétaires coutumiers expropriés ; l'élaboration d'un plan de gestion durable de la ceinture verte et la création d'une structure nationale de pilotage de la ceinture verte.

    En outre, plusieurs actions ont été entreprises, dont entre autres l'organisation d'un Forum National sur la Gestion Durable de la Ceinture Verte de Niamey, la diffusion des recommandations du Forum, la mise en place d'un Comité Ad hoc chargé du suivi et de la mise en œuvre des recommandations du Forum National et le reboisement de la ceinture verte. En perspective, le comité compte faire adopter ses propositions par le gouvernement. Selon le comité, ceci permettra de  définir les nouvelles limites de la ceinture verte et de  régulariser son statut juridique. Il permettra aussi de délimiter et borner les différents blocs de la ceinture verte, d'élaborer un plan d'aménagement de la ceinture basé sur les propositions faites et les nouvelles fonctions qui seront établies.

    En définitive, il permettra de délimiter et cartographier les champs dans la ceinture verte, de faire des propositions de dédommagement conformément à la loi et enfin de mettre en œuvre le plan d'aménagement à travers les différents projets et les cahiers de charge établis. Le comité recommande de poursuivre la surveillance pour arrêter les travaux de construction dans la ceinture verte de Niamey. Cette surveillance doit par ailleurs être soutenue par des communiqués radio.

    Source :

    Culture

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