• 50e anniversaire – Niger : ventre affamé ne fête pas

    (Syfia Niger) Le 3 août prochain, le Niger célébrera sans éclat le cinquantième anniversaire de son indépendance. Le gouvernement a supprimé toutes les festivités en raison de la crise alimentaire qui frappe le pays depuis plusieurs mois.

    Le 3 août prochain, date anniversaire du cinquantenaire de leur indépendance, les Nigériens n'auront pas le cœur à la fête. "Au regard de la crise alimentaire que vit la moitié de la population, nous devons bannir le gaspillage et conjuguer nos efforts pour sortir honorablement de cette situation", a indiqué dernièrement le Premier ministre, Mahamadou Danda, aux membres du comité chargé de l’organisation du cinquantenaire. Seules les activités traditionnelles de prise d’armes et de plantation d'arbres devraient être maintenues. Ainsi en a décidé la junte, qui a déposé le régime du président Mamadou Tandja en février dernier.
    Le Niger subit cette année une famine qui décime le cheptel et pousse les hommes à l'exode, laissant derrière eux des femmes et des enfants durement touchés. L’aide internationale, loin de répondre aux besoins, arrive au compte-gouttes. "Avant l'indépendance, le pauvre paysan vivait mieux qu’aujourd’hui. Les choses se sont vraiment gâtées. La faim nous tenaille le ventre", lance Souley Boukary, 73 ans, agriculteur à Zinder, qui fût la première capitale du Niger. Avec le changement climatique, les pluies sont devenues encore plus rares et irrégulières. "Par le passé, les champs produisaient très bien", se souvient Aliou Zakari, 75 ans, cultivateur dans la même région. "Maintenant, presque tous les cinq ans, il y a une crise alimentaire dans notre pays", conclut-il d'une voix tremblotante. "Et les bouches à nourrir sont nombreuses !", renchérit Moussa Hassane, 70 ans, enseignant à la retraite.

    Explosion démographique et famines récurrentes
    Le Niger a connu de grandes sécheresses et des famines en 1973, 1984-85, 2005 et 2010. Et sa population croît au rythme de plus d'un demi million d’habitants chaque année. Même s'il a commencé à baisser, l’indice de fécondité reste le plus élevé au monde (7,2 naissances par femme). De trois millions au moment de l'indépendance, la population nigérienne est passée à 14 millions en 2010 et devrait atteindre entre 21 et 25 millions en 2025. De nouvelles bouches que le pays peinera à nourrir sans un changement de cap radical et des investissements massifs dans l'agriculture. "Tout comme du temps du colonisateur, rien de sérieux n’a été fait pour accélérer le développement des filières céréalières. Le gros des investissements a été réalisé dans les cultures de rente. Pendant toutes ces années, l’agriculture, qui occupe plus de 80 % de la population, est restée rudimentaire", regrette Moussa Amadou, 73 ans, agent de l’Agriculture à la retraite.
    Le reste de l'économie aussi semble grippé. "Après l'indépendance, plusieurs sociétés et entreprises ont été créées. Une vingtaine d’années après, on a constaté un relâchement", rappelle El Hadji Souley Moutari, 71 ans, opérateur économique à la retraite, faisant allusion aux sociétés qui ont fermé leurs portes pour cause de mauvaise gestion. "À notre époque, l’économie était en meilleure santé. J’aimerais revivre cette période où l’on vivait bien avec un petit salaire", soupire-t-il.
    Selon Adou Adam, ancien administrateur, 73 entreprises publiques et semi-publiques avaient été crées au Niger de 1960 à 1974, dont "63 n’avaient pas de problèmes de gestion". "Depuis les années 1980, aucune grande entreprise (publique ou semi-publique, Ndlr) ne s'est créée. La mauvaise gestion et les querelles politiques ont tout bloqué. La jeunesse, frappée de plein fouet par le chômage, en fait les frais", regrette Boubacar Sani, 48 ans, économiste. Il estime que les réformes des entreprises publiques lancées en 1985 n'ont pas permis de redresser la situation.

    "Nous avons des ressources"
    Seules 135 entreprises ont été répertoriées en 2009, selon les données de la Chambre de commerce d’industrie et de l’artisanat du Niger, "De plus en plus, le secteur privé booste l’économie du pays par la qualité de ses produits", observe Mme Maidah Zeinabou, directrice de Niger-lait, une des entreprises qui arrivent à sortir la tête de l’eau. "Nous avons des ressources et nous devrons les mettre en valeur au nom de tous les Africains, estime le sociologue et chercheur nigérien, Diouldé Laya, ancien étudiant de la 18e université française de Dakar. Notre pays n’est pas la colonie pénitentiaire de l’Afrique Occidentale française, avec seulement du sable."
    Parmi les ressources du pays, l'uranium. En 2008, le Niger était le 6e producteur mondial de ce minerai. Ces 40 dernières années, plus de 100 000 tonnes ont été extraites du sous-sol nigérien. "Le gouvernement ne perçoit qu'une faible part des revenus de l'uranium", affirme Ali Idrissa, coordonnateur local de la coalition internationale de la société civile Publiez ce que vous payez. Selon lui, cette richesse profite surtout aux sociétés étrangères.
    En 2009, au niveau mondial, le Niger est retombé au dernier rang du classement de l'indicateur de développement humain du PNUD.


    Encadré

    "Afrique : 50 ans d’indépendance"
    un web-documentaire d'arte.tv

    http://www.arte.tv/afrique

    Chaque mois, sur le site d'arte.tv, un guide nous conduit à travers la capitale de son pays. Il nous fait découvrir son regard et celui de ses compatriotes sur cinquante années d'indépendance, mais aussi sur le quotidien et les espoirs qu'ils nourrissent pour l'avenir.
    Au programme de ce voyage en ligne : le Cameroun, le Sénégal, le Tchad, le Bénin, le Togo, le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire, la République centrafricaine, le Congo, la RD Congo, le Gabon, la Mauritanie, le Mali, le Niger et Madagascar. Chacun de nos guides est prêt à vous conduire dans différents lieux de la capitale. Cliquez sur les bulles qui apparaissent durant votre parcours et choisissez où vous souhaitez aller, qui vous souhaitez rencontrer et questionner...
    Un documentaire interactif en hypervidéo et en haute définition, à commenter et à partager… à découvrir sur le site d’arte.tv :

    "Voyage dans le temps, voyage au présent et une préparation à celui du futur. C’est là notre seule ambition. Nous avons choisi de poser ce regard sur une douzaine de pays de l’Afrique francophone qui ont pris leur indépendance en 1960.
    Comme toutes les balades notre périple africain fourmille de surprises, de rencontres inattendues, de passages obligés, d’oublis et de regrets aussi.
    Nous laisserons aux historiens le soin de dresser le bilan d’un demi-siècle d’indépendance(s) et aux sociologues, ethnologues, géographes et autres économistes celui de décortiquer le quotidien d’un milliard d’habitants, mais nous les convoquerons régulièrement pour jalonner notre chemin.
    Comme il n’est pas de bon voyage sans bon pilote, dans chaque pays, un guide nous attendra et nous proposera une journée de découvertes dans sa capitale. Voyageurs pressés, le temps nous manquera pour visiter les campagnes, il faudra leur consacrer une autre série.
    Au bout de l’aventure nous aimerions offrir un cliché sans clichés d’une Afrique lue dans toute sa diversité, ses travers, ses richesses et ses contradictions. En une douzaine d’étapes, nous aimerions poser un regard le plus lucide possible sur ce continent de tous les possibles.
    Bon voyage !"

    Source : http://www.syfia.info/

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